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Verdir l'autoroute Métropolitaine : comment faire d'un rêve une réalité ?

Par Grégoire Bally et Camille-Charlotte Gilbert-Lapointe

Comité de coordination de l’ALLIIUM

Publié le 21 janvier 2021

Quand vous imaginez le Montréal de demain, quelle place reste-t-il pour les autoroutes, ces grandes cicatrices urbaines qui divisent notre territoire? Il est urgent, dans le contexte climatique et social actuel, de repenser l’usage de ces infrastructures majeures, et c’est exactement ce que propose le projet Métropoligne 40 : la requalification de la portion suspendue de l’autoroute Métropolitaine, par l'enfouissement des voies de circulation automobile sous la surface du sol et la création du plus grand potager/verger urbain au monde sur sa structure actuelle. Nous vous partagerons ici les recommandations d’étudiants en développement durable pour faire de ce projet utopique une réalité. 

 

 

 

La réfection prochaine de l’autoroute Métropolitaine représente une opportunité exceptionnelle pour innover et redéfinir la fonction d’une infrastructure aussi importante dans le paysage montréalais. C’est autour de cette vision commune que se sont réunis les membres de l’Alliance pour l’innovation dans les infrastructures urbaines de mobilité (ALLIIUM), un groupe de réflexion collaboratif qui vise à promouvoir auprès des acteurs clés des idées audacieuses, inspirées de la nature et rehaussant le bien-être des communautés, concernant les infrastructures de mobilité urbaine d’aujourd’hui et de demain. L’équipe de l’ALLIIUM souhaite faire de cette proposition utopique - la requalification de l’autoroute Métropolitaine - une réalité, et c’est dans cette perspective qu’elle souhaite impliquer les communautés de ses partenaires. 

 

Ainsi, depuis 2019, HEC Montréal collabore avec diverses organisations pour faire travailler ses étudiants sur des projets d’infrastructures concrets et inspirants, afin de les impliquer directement dans le changement. C’est d’ailleurs à travers une collaboration avec la Biosphère, via son exposition MTL+ invitant des cabinets d’architectes à se projeter dans le futur et présenter leurs visions utopiques des infrastructures du Montréal de demain, que la Métropoligne 40 a su susciter l’intérêt et capter l’attention de la communauté de HEC Montréal.

 

Dans le cadre de la session d’automne 2020, les étudiants de la maîtrise en management et développement durable ont été appelés à travailler sur différents mandats en lien avec le projet Métropoligne 40. Certains se sont intéressés à l’analyse de projets d’infrastructures d’envergure, comme le Big Dig de Boston et le High Line de New York, afin d’en tirer des leçons tant sur les coûts, les impacts que les risques. D’autres se sont plutôt penchés sur la place de l’économie circulaire et des solutions basées sur la nature dans l’élaboration du projet, dans les communications ainsi que dans les stratégies de mitigation des impacts potentiels d’un projet aussi structurant. 

 

De ces travaux sont ressorties de riches observations et propositions, pour l’ALLIIUM comme pour le projet Métropoligne 40. En tant que coordonnateurs de l’ALLIIUM, nous participons activement au développement, que ce soit à travers des travaux de recherche ou la mise en place de différents outils; il est donc très important pour nous de prendre le temps de lire ces rapports et de recueillir les recommandations des étudiants pour en faire bénéficier le projet et l’alliance. C’est donc avec grand plaisir que nous vous partageons notre interprétation des principales recommandations pour assurer le succès d’un projet d’infrastructure urbaine innovant comme la Métropoligne 40.

 

Dialogue avec les parties prenantes 


Adapter ses stratégies de communication en fonction des parties prenantes.

La communication est un levier essentiel que l’ALLIIUM devrait apprendre à manier rapidement et habilement pour créer des relations de confiance avec l’ensemble des acteurs clés, notamment la Ville de Montréal, les mairies d’arrondissement, le ministère des Transports du Québec, les Montréalais, les agriculteurs, les investisseurs potentiels, les entreprises et commerçants du secteur et les organismes de la société civile. Pour ce faire, elle devrait établir une communication continue avec ses parties prenantes et bien articuler son discours pour mettre en valeur les avantages concrets pour chacune d’elles.
 

Cultiver le dialogue avec les citoyens.

Le dialogue citoyen devrait être mis au cœur de cette stratégie et être entrepris le plus rapidement possible, pour s’assurer que le projet soit bien imaginé par et pour les Montréalais. Ce dialogue devrait être constructif, tant dans la transmission des informations vers la population que dans l’écoute et la réponse à leurs revendications et interrogations. Dès maintenant, l’ALLIIUM devrait encourager la population à faire partie de la solution en les invitant à partager leur opinion et à participer activement à la coconstruction du projet. 

 

Développer le dialogue et établir des partenariats avec les organes gouvernementaux.

Obtenir l’appui des acteurs politiques est crucial pour le lancement et la réalisation d’un tel projet. Il serait donc primordial pour l’avenir de la Métropoligne 40 de créer rapidement des liens avec les organes gouvernementaux appropriés (Ville de Montréal, mairies d’arrondissements, gouvernement du Québec), afin non seulement de les sensibiliser aux retombées du projet, mais aussi d’assurer leur implication et entretenir un dialogue ouvert tout au long du projet. 

 

Promotion du potentiel du projet pour un Montréal vert et circulaire

 

L’ALLIIUM devrait exposer à chaque partie prenante les multiples avantages que représente l’inclusion des solutions basées sur la nature et de l’économie circulaire dans le projet. Il faudrait non seulement partager le rôle central de ces solutions, mais aussi expliquer clairement les principes derrière ces modèles alternatifs et commencer la familiarisation des différents acteurs avec ces nouvelles méthodes.

 

Prioriser l’intégration de solutions basées sur la nature tout au long du projet.

On entend par solutions basées sur la nature des “actions qui s’appuient sur les écosystèmes afin de relever les défis globaux comme la lutte contre les changements climatiques, la gestion des risques naturels, la santé, l’accès à l’eau, la sécurité alimentaire” (UICN, 2020). Dans le cadre de la Métropoligne 40, cela pourrait être par exemple l’utilisation de bambou ou de murs végétalisés pour réduire la pollution sonore pendant les travaux. 

 

Mettre en valeur les bénéfices potentiels de l’économie circulaire.
Ensuite, on entend par économie circulaire “un système de production, d’échange et de consommation visant à optimiser l’utilisation des ressources à toutes les étapes du cycle de vie d’un bien ou d’un service, dans une logique circulaire, tout en réduisant l’empreinte environnementale et en contribuant au bien-être des individus et des collectivités” (Sauvé et al., 2016). Dans le cadre du projet, la pratique de l’agriculture urbaine sur toute la structure suspendue de l’autoroute permettra d’accroître l’accessibilité à des produits frais à proximité des points de consommation et de créer un système de compostage qui sera réintégré directement dans le potager urbain, ce qui contribuera à la réduction du gaspillage alimentaire tout au long de la chaîne d’approvisionnement.
 

Développer un cahier des charges innovant, exhaustif et inclusif.

Un cahier des charges devrait être créé et validé dans une démarche collaborative par l'ensemble des parties prenantes du projet. Il sert à formaliser les besoins et les exigences du projet, et à regrouper les stratégies et approches sélectionnées pour les rencontrer. On y retrouverait l’ensemble des requis techniques, mais aussi des engagements sociaux et environnementaux que les entrepreneurs devront respecter tout au long du projet. La vision utopique du projet Métropoligne 40 devrait être reflétée tout au long du processus requis pour la concrétiser; il faudrait réfléchir aux avenues d’intégration de solutions basées sur la nature dans nos pratiques de construction, pour arriver à altérer la perception négative des travaux de réfection aujourd’hui associés aux nombreux déchets et aux multiples nuisances qui en découlent. 

 

Stratégies de mitigation des impacts

 

Inclure un budget significatif pour les mesures de mitigation.

Il ne faut surtout pas sous-estimer les coûts potentiels associés aux mesures de mitigation. Vu le coût et l’investissement en temps et en ressources pour répondre à toutes les demandes, mais aussi les différentes mesures physiques mises en place pour réduire les impacts, cela représente une portion non négligeable des dépenses à planifier. À titre comparatif, le budget pour les mesures de mitigation, en temps et en ressources, a représenté à lui seul le tiers de la facture du Big Dig de Boston!

 

Assurer un suivi rigoureux par l’entremise d’un organe de gestion collaboratif.

Dans un projet d’une telle envergure, il est essentiel de mettre en place des mécanismes de suivi et de contrôle, tout en accordant une attention particulière aux coûts et risques associés au projet (financiers, mais aussi environnementaux et sociaux). La création d’un comité collaboratif indépendant composé de représentants des parties prenantes permettrait de s'assurer du respect du cahier des charges et du suivi de réalisation des travaux, mais aussi du bon fonctionnement de l’infrastructure une fois celle-ci terminée. 

 

Développer des mesures de mitigation innovantes et adaptées. 

Les solutions basées sur la nature, partie intrinsèque du projet final, pourraient également avoir un rôle important à jouer dans la mitigation des impacts, en permettant de limiter la pollution sonore (par exemple grâce aux bambous et aux saules européens), de récupérer une portion du CO2 dégagé et de verdir l’espace minéral. De plus, en prenant exemple sur ce qui a été fait pour l’échangeur Turcot, les matières extraites du chantier de l’autoroute Métropolitaine devraient être traitées, recyclées et réutilisées. Aussi, l’utilisation de machinerie hybride sur les chantiers permettrait aussi de limiter la pollution sonore et réduire les émissions de GES.

 

S’assurer de l’accessibilité continue des secteurs touchés.

La situation des citoyens riverains devrait être parmi les préoccupations principales dans les stratégies de mitigation, surtout en ce qui a trait aux répercussions en aval du projet. L’ALLIIUM devrait ainsi encourager l’adoption de mécanismes de régulation des logements et de quotas pour les zones de commerce pour limiter la potentielle gentrification des secteurs riverains, comme cela a été le cas pour le High Line de New York. 

 

De la communication aux stratégies de mitigation, en passant par les relations avec ses parties prenantes, il est encourageant de voir que les recommandations des étudiants rejoignent directement les grands objectifs que l’équipe de l’ALLIIUM s’est fixés pour l’année à venir. Il s'agira d’analyser et de créer des solutions basées sur la nature pour les infrastructures de mobilité tout en entamant un dialogue avec les citoyens et les communautés autour du projet Métropoligne 40. 

 

Si vous désirez en apprendre davantage sur l’Alliance pour l’innovation dans les infrastructures urbaines de mobilité et sur son projet phare Métropoligne 40 ou vous impliquer auprès de l’ALLIIUM, n’hésitez pas à nous contacter au info.alliium@gmail.com.


 

Mots clés: innovation, infrastructure, autoroute, ALLIIUM, Métropoligne

Références

Les recommandations ont été tirées de travaux réalisés dans le cadre du cours DDRS40402 Développement durable et gestion : enjeux et pratiques, offerts à l’automne 2020 par HEC Montréal. 

 

Aubertin-Hogue, Mathilde, Halyna-Tatiana Boris, Gabrielle Brouillard, Sarah Di Francesco et Mejasoa Razafimihary (2020). Métropoligne 40, [travail de session], Montréal, HEC Montréal.

 

Brosseau, Frédérique-Anne, Marie Hamelin, Carolanne Leduc et Alex Lussier (2020). Travail de groupe: Métropoligne 40, [travail de session], Montréal, HEC Montréal.

 

Dodeler, Camille, Maude Gohier-Murray, Florent Liaigre, Maimouna Sacko, Delphine Therer Michaud et Bianca Valletta (2020). Métropoligne 40, [travail de session], Montréal, HEC Montréal.

 

Ha, Nancy, Hawa Kourouma, Nicolas Rioux et Caroline Tremblay (2020). La Métropoligne 40 et les solutions basées sur la nature, [travail de session], Montréal, HEC Montréal.

 

Sauvé, Sébastien, Daniel Normandin, et Mélanie McDonald (2016). L’économie circulaire. Une transition incontournable, Les Presses de l’Université de Montréal. Récupéré de http://instituteddec.org/DEV/wp-content/uploads/2016/09/Economie-circulaire_transition-incontournable_IEDDEC-final.pdf 

 

UICN (2019). Les solutions fondées sur la nature, UICN - Comité Français. Récupéré le 19 janvier 2021 de : https://uicn.fr/solutions-fondees-sur-la-nature/

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